Rotem Genossar, l’homme qui fait courir les migrants en Israël
L’altruisme pur n’existe pas. On veille au bien des autres pour soi, aussi. Pour se construire et s’épanouir, dans le dévouement. Rotem Genossar est un homme de ce tempérament. Il n’y a aucune raison de chercher des aspérités ou d’attendre des débordements chez ce grand et mince gaillard de 33 ans à la mâchoire carré, mal dissimulée par une barbe négligée. C’est un homme pondéré, qui suit des principes comme un manuel de montage. Son métier premier reste l’enseignement. Mais il a mis cette activité entre parenthèses. Il est le fondateur et le manager d’un club d’athlétisme hors normes en Israël, destiné à accueillir, encadrer et promouvoir de jeunes migrants africains talentueux.
Après cinq ans d’existence, dit-il, on parvient à être à 100 % un projet social et à 100 % un projet sportif. Je sais, je ne suis pas bon en maths, mais les deux vont de paire.
Le club à but non lucratif Hasimta Athletics (ang) a commencé avec quinze filles, originaires du sud de Tel-Aviv, où se concentre la population africaine, dans des quartiers paupérisés à la mauvaise réputation. Aujourd’hui, cent vingt garçons et filles se côtoient. Seuls 20 % sont originaires des communautés de réfugiés. Une large majorité sont des juifs éthiopiens, des Falashas. Malgré cette normalisation progressive, le club demeure totalement atypique en raison de l’ambition et du discours de ses fondateurs. Ils tendent la main à des jeunes déboussolés, aux parcours jalonnés de traumatismes, aux familles éparpillées, qui rencontrent peu de bienveillance dans la société israélienne.
« Les infiltrés »
Ils sont près de 40 000 « infiltrés », selon l’horrible terme en vigueur dans le pays, originaires d’Erythrée et du Soudan du Sud. Non expulsables, confinés aux travaux pénibles, mais auxquels on refuse le statut de réfugié. Leur flux a été stoppé net après l’édification d’une clôture de sécurité à la frontière entre Israël et l’Egypte, fin 2011. Jusqu’à lors, le Sinaï était la porte d’entrée des migrants africains en Israël, dont le sort n’a cessé de faire l’objet de tensions entre la droite au pouvoir et la Cour suprême. Le mot « infiltré », utilisé aussi bien par les responsables politiques que par les médias, était réservé à l’origine aux Palestiniens qui entraient en Israël pour y commettre des attentats.
Rotem Genossar, lui, s’est mis au service des jeunes Africains les plus doués et les plus motivés, dans cette cité de Tel-Aviv plus métissée et ouverte que le reste du pays. Une bulle, disent ses contempteurs. Le manager a un fils adoptif âgé de 5 ans. Il est né dans un orphelinat à Moscou, d’une mère ouzbèke, migrante du travail. La femme de Rotem, elle, était correctrice au Haaretz, le grand quotidien de centre-gauche, « mais le métier n’existe plus, comme la soviétologie », rit-il. Elle assure donc la promotion de sites Internet.
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