À travers la lentille noire : le racisme dans le football
Une bonne majorité des discussions autour du sport sont centrées sur son impact positif dans notre société. Cependant, malgré sa nature positive, le sport a été et peut être utilisé pour renforcer les conflits. Ces derniers temps, on a assisté à une augmentation alarmante des cas d’abus racistes dans le monde du football. Ces abus prennent la forme de chants racistes dans les stades pendant les matches, d'insultes racistes en ligne et de renforcement des stéréotypes racistes à l'encontre des joueurs noirs. Cela est évident dans la plupart des ligues européennes et peut être observé auprès des acteurs à différents niveaux, depuis les supporters et les arbitres jusqu'aux dirigeants.
Il est important que nous cherchions à comprendre les facteurs contextuels qui encouragent ces actions. Parmi eux, il y a le manque de sensibilisation et de plaidoyer contre le racisme dans le football, qui conduit finalement à sa normalisation dans l’industrie. Avant sa mort l'année dernière, le sociologue et écrivain italien Mauro Valeri a recensé plus de 80 cas d'abus en l'espace de deux saisons dans la ligue de football des jeunes en Italie. Certains cas concernaient des enfants âgés de 12 ans. Il a déclaré que les abus raciaux dans le sport sont le reflet de ces sociétés, ce qui explique leur hésitation à y faire face.
Le manque de diversité au sein de la direction des organisations sportives constitue l’un des principaux défis dans la lutte contre le racisme. Sachant qu'il existe un grand nombre de joueurs noirs dans la plupart de ces ligues, il est essentiel d'avoir une représentation tout aussi diversifiée dans les salles de réunion et dans les abris. Par exemple, un seul des 32 sélectionneurs de l’équipe nationale était noir lors de la Coupe du monde 2018. En outre, une étude réalisée en 2014 par FARE a révélé que seulement 0,6 % des postes de haute gouvernance et 0,4 % des postes de direction dans le football européen étaient occupés par des minorités ethniques. Il est donc important que le respect de la diversité soit accordé directement par les dirigeants. Une meilleure représentation garantit également que les efforts contre ces violations soient renforcés.
L’ indulgence des instances dirigeantes du sport dans la punition des contrevenants et des équipes impliquées minimise tout effort contre le racisme. Le règlement stipule que tout joueur ou officiel coupable de racisme est passible d'une suspension d'au moins 10 matchs. De plus, les équipes ou clubs internationaux dont les supporters se livrent à des actions discriminatoires sont passibles d'une déduction de points, d'une relégation ou d'une disqualification d'une compétition. Cependant, aucune de ces mesures extrêmes n’a été appliquée. Certains joueurs victimes se sont résignés à agir eux-mêmes. Par exemple, Raheem Sterling de Manchester City met en place un groupe de travail en Premier League pour lutter contre les cas d'abus croissants, tandis que Paul Pogba a lancé une initiative de brassards qui éradique l'ignorance raciale. Cela montre non seulement leur détermination, mais aussi l’incompétence des dirigeants à répondre aux problèmes avec le niveau de sérieux approprié.
Cela nécessitera une action unifiée de tous les acteurs du sport pour lutter contre ces violations. Une grande responsabilité incombe également aux légendes du football, qui utilisent leur position d'influence dans le monde du football et dans la société pour condamner énergiquement ces actes de soutien aux autres joueurs.Judith Macharia est chercheuse en sport pour la paix et le développement.
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