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Démultiplier l’impact social du sport : défis et perspectives
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En mai dernier, Paris accueillait la troisième édition de la Global Sports Week (GSW) : un forum visant à faire du sport mondial une force innovante, positive et durable, capable de répondre aux nouveaux enjeux du monde contemporain. L’occasion de faire un point sur les processus entamés et les défis à relever.

Cet article a été soumis dans le cadre de notre appel visant à remodeler l'avenir du Sport et Développement.

Comment concilier croissance et responsabilité dans l’industrie du sport ? Cette question était au cœur du programme 2022 de la Global Sports Week, un événement désormais annuel, dont l’objectif est « d’échanger, faire bouger et construire » l’avenir du sport, à la croisée des enjeux business et de la société.

Pour la filière sport, les défis relatifs à la recherche de nouvelles audiences, de revenus et d’opportunités commerciales doivent désormais cohabiter avec ceux relevant de la Responsabilité sociale des entreprises (RSE). Le secteur sportif doit aussi prendre en considération les préoccupations de sociétés en mutation, dans une logique relevant du concept Build Back Better, remis à l’ordre du jour par la crise du Covid-19.

Le poids économique du secteur sportif est colossal : il génère environ 2 % du PIB mondial (près de 1 200 milliards d’euros) et sa croissance moyenne est de 4 % par an (CESE, 2019, p.10). Il représente, dans sa grande diversité, un secteur incontournable sur l’échiquier international.

Au sens large, le sport peut jouer un rôle déterminant en matière de changement. Il offre de multiples possibilités de transdisciplinarité et de complémentarité entre différents dispositifs (Blough, 2020, p.58). Pensé de manière adéquate, le sport peut être mis au service du développement durable, dont l’objectif est de répondre aux besoins sociaux et à la protection de la planète tout en favorisant la croissance économique. Il présente également un fort pouvoir d’attraction et les acteurs qui le composent sont nombreux et hétérogènes. En cela, le sport peut particulièrement contribuer à l’atteinte de l’Objectif de développement durable (ODD) 17, qui prône une coopération multi parties-prenantes.

Le potentiel est grand, les synergies possibles et les initiatives foisonnantes, toutefois, promouvoir le sport comme vecteur de développement n’est pas exempt de limites ni de dérives. Qu'en est'il de l’impact social du sport ? Comment en faire un réel levier de développement durable ?

Le sport comme plateforme

Le secteur sportif doit repenser son incidence sur la société. L’un des moyens d’actions souvent mis en avant, et cité à maintes reprises lors de la GSW, est que le sport représente une plateforme pour le changement.

En effet, par sa portée universelle et sa transversalité, le sport peut aider à aborder de nombreux sujets de société. Grâce à leur ampleur médiatique, les grands événements sportifs internationaux ont notamment la capacité de rendre visibles des communautés minoritaires et/ou marginalisées. Ainsi, le Comité International Olympique (CIO) a créé en 2016 l’équipe olympique des réfugiés afin « d’envoyer un message d'espoir et d'intégration à des millions de personnes déplacées de force partout dans le monde ». Cette initiative a été reconduite lors des Jeux Olympiques (JO) de Tokyo 2020 et le sera également pour Paris 2024 et les Jeux Olympiques de la Jeunesse (JOJ) de Dakar 2026.

Les Jeux Olympiques et Paralympiques peuvent aussi offrir une tribune pour promouvoir l’égalité des sexes : le nombre de femmes concourant aux JO de Tokyo 2020 était de 48,8 % et Paris 2024 devraient être les premiers Jeux Olympiques d’été à atteindre une égalité parfaite. Les Jeux Paralympiques, quant à eux, contribuent à sensibiliser à la question du handicap et tous les exemples susmentionnés participent à combattre les stéréotypes et à construire une société plus inclusive.

Les athlètes jouent un rôle de premier plan dans ce plaidoyer visant à élargir l’horizon des futures générations et à les inspirer. Ici, la notion de « rôle modèle », conceptualisée par le sociologue américain Robert K. Merton et qui reste vivace dans les questions d’intégration, prend tout son sens. Les valeurs associées au sport et les qualités attribuées aux athlètes d’élite, les positionnent naturellement en tant qu’agents de changement.

Du storytelling à l’activisme politique, nombre de sportives et sportifs de haut-niveau partagent leur histoire, y compris sous le prisme d’un sujet de société (handicap, féminisme, ascension sociale, etc.) et/ou s’engagent en faveur d’une cause, par exemple en devenant ambassadrice ou ambassadeur de bonne volonté d’une organisation à vocation sociale. Ce leadership narratif représente une modalité d’action pour faire bouger les lignes, tendance dont les marques, notamment à travers le marketing d’influence, s’accommodent très bien et qu’elles encouragent également.

Sans jamais nier le pouvoir de la sensibilisation en matière d’évolution des mentalités, la rhétorique, seule, ne pourra engendrer un changement sociétal durable. Pour ce faire, il est donc crucial d’allier discours inspirants et initiatives concrètes, où la mesure de l’impact social du sport sera une priorité.

Lyrisme et sportwashing : limiter les dérives

Dans son essai éponyme, David Blough, définit le terme sportwashing comme étant « issu de la contraction des mots sport et whitewashing (métaphore qualifiant à l’origine, dans son acceptation anglaise, un « travestissement » de la réalité) » et qui « désigne un processus de mythification et de mise à profit du sport s’appuyant sur l’idée qu’il comporterait des valeurs positives intrinsèques. Il révèle malgré lui une disproportion notoire entre un certain discours sur le sport et la réalité des effets sur la société ». Pour l’ex-directeur de l’ONG PLAY International, « le sportwashing peut être pratiqué de manière volontaire ou inconsciente, active ou passive […] et se caractérise par l’usage – ou l’absence de remise en cause – d’idées reçues, par exemple exprimées à travers des sentences comme : « le sport c’est l’école de la vie. ».

L’idée que le sport, grâce à ses valeurs inhérentes (fair-play, discipline, respect, esprit d’équipe, partage…), pourrait permettre de résoudre un ensemble de problématiques sociétales, tend effectivement à devenir un lieu commun. En réalité, le sport est un fait social. Il est ce que l’on en fait. Il peut être à la fois un catalyseur ou un outil de lutte contre le racisme. Il peut contribuer à combattre les stéréotypes de genre, ou bien à les renforcer. De même, l’activité physique, à elle seule, ne résoudra pas l’ensemble des problèmes de santé publique. Si le sport en tant qu’outil, peut effectivement agir en faveur de l’inclusion, de l’égalité des sexes, de la santé ou encore de l’environnement, son impact réel dépendra de la façon dont il est utilisé et des objectifs poursuivis, et non pas de sa nature prétendument positive.

Lors de la GSW, David Grevemberg, le directeur de l'innovation et des partenariats du Centre des sports et des droits de l’homme, a interpellé l’assistance quant aux risques relatifs aux pratiques précitées. Selon lui, « chaque décision a un impact », dans un écosystème où évolue une grande diversité d’acteurs présentant une multitude de rôles, de risques et d’opportunités, « d’où la nécessité de travailler ensemble, dans une logique relevant de la théorie du changement, de rechercher des résultats collectifs et de créer une culture positive à travers une approche multi parties-prenantes, pour que le sport devienne un réel droit humain accessible à tout un chacun ».

Faire du sport une partie de la solution

Le sport n’est pas magique, mais utilisé de manière intentionnelle et adaptée, il peut représenter un moyen efficace pour favoriser le changement social. Pour maximiser ce potentiel, il est nécessaire de développer à la fois le secteur du sport et celui du « sport au service du développement et de la paix (SDP) ». Ce dernier représente un secteur émergent de la coopération au développement, qui promeut l’usage délibéré du sport et de l’activité physique comme un outil pour atteindre des objectifs de développement et de paix (Dudfield & Dingwall-Smith, dans Secrétariat du Commonwealth, 2020, p.8). Le SDP se concentre sur l’ensemble des effets engendrés par le sport sur les personnes et les communautés, en termes de bénéfices socio-économiques et de développement durable (De Coning, dans Secrétariat du Commonwealth, 2020, p.8).

Pour que le sport au sens large soit un réel vecteur de transformation, le SDP doit s’inscrire dans le développement du sport tout en s’en distinguant (Sanders, 2018, p.45). De fait, « le sport, seul, a peu de chances de réussir. Mais il en va de même pour les programmes utilisant le sport comme support, sans expertise ni infrastructures » (Sanders, 2018, p.46).

La majorité des acteurs du monde sportif semblent désormais conscients des enjeux sociétaux du sport business et les multiples initiatives soulignées lors de la GSW 2022 sont encourageantes. Parmi elles, citons l’allocution d’Alan Gilpin, Directeur général de World Rugby, sur l’impact des grands événements sportifs sur l’environnement et la présentation de la Stratégie Environnementale 2030 de la fédération, ou encore l’intervention d’Amina Lanaya, Directrice générale de l’Union Cycliste Internationale (UCI), sur le travail réalisé en faveur de l’égalité des sexes dans le cyclisme (introduction d’un salaire minimum et d’une protection sociale pour les coureuses salariées, etc.). Du côté des industriels, Adidas a présenté le projet caritatif Run for the Oceans, visant à lutter contre la pollution plastique par le biais de la course à pied.

Si le processus est enclenché, il reste de nombreux défis à relever, parmi lesquels la conscientisation et la coordination de toutes les parties prenantes, la mobilisation des ressources, la gouvernance, la mise en place de cadres stratégiques et opérationnels…Pour faire du sport une réelle force motrice, il est primordial que les deux approches, différentes mais interdépendantes du sport et du SDP, atteignent un point de convergence. C’est en optimisant l’utilisation volontaire et adaptée du sport, et non pas en misant sur ses éventuels effets indirects, que l’on en fera un réel levier de développement durable.

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Hélène Bennès est consultante senior pour la version francophone de sportanddev.

Auteurs

Consultante pour la version francophone de sportanddev

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