La diplomatie sportive comme élément de diplomatie publique

La diplomatie est un moyen d'interaction entre États dans lequel ils cherchent à influencer les intérêts nationaux de chacun sans recourir à la force militaire. La fonction principale de la diplomatie est de résoudre les problèmes controversés par des moyens pacifiques, par le biais de négociations et d'accords. Au XXe siècle, la diplomatie publique, ou diplomatie dite de peuple à peuple, s’est répandue.
La diplomatie publique comprend des aspects des relations internationales qui dépassent sa sphère traditionnelle : la diplomatie des organisations publiques, des groupes informels et des individus représentant diverses sphères de la vie publique. L’un de ces domaines est celui du sport et par extension de la diplomatie sportive, qui constitue aujourd’hui une part essentielle de la diplomatie publique.
La diplomatie sportive représente les activités officielles et non officielles des États, des gouvernements et des agences spéciales de politique étrangère, visant à mettre en œuvre les objectifs de politique étrangère d'un État en organisant, conduisant et participant à des événements sportifs internationaux. Selon le chercheur américain S. Murray, la diplomatie sportive est l'acte de diplomatie et de représentation, accompli par les représentants des institutions sportives au nom et avec le consentement de l'État. Si la diplomatie est considérée comme un moyen d'atteindre les objectifs de politique étrangère d'un État, la diplomatie sportive est l'un des nombreux outils d'une telle boîte à outils. Ce type de diplomatie utilise les capacités des athlètes, des responsables sportifs et des compétitions sportives pour créer une image attrayante de leur pays auprès du public étranger.
L'éventail des participants à la diplomatie sportive est inhabituellement large : il s'agit des États, des agences gouvernementales dans le domaine du sport, des associations sportives internationales et nationales, des athlètes, des entraîneurs, des professionnels du sport, des médias, des mouvements de supporters, etc. être divisé en deux directions, classées comme officielles et non officielles.
La dimension officielle implique l'utilisation des compétitions sportives comme plate-forme pour des réunions politiques informelles, la discussion des problèmes actuels et l'élaboration d'accords sur certaines questions. Par exemple, lors des Jeux olympiques de Pékin en 2022, le président chinois Xi Jinping devait tenir des réunions bilatérales avec de nombreux dirigeants venus assister à l'événement - Russie, Kazakhstan, Arabie saoudite, Argentine, Pologne et bien d'autres. La dimension non officielle de la diplomatie sportive concerne l'impact sur les populations étrangères : le sport sert de facteur psychologique pour illustrer la force, la puissance et le succès d'un État particulier. La France considère notamment le sport comme l'un des instruments de rayonnement international dont la mission la plus importante est d'améliorer l'image du pays sur la scène internationale, de renforcer l'importance du savoir-faire français et de promouvoir l'utilisation des Langue française.
Aujourd'hui, la diplomatie sportive agit comme un facteur d'intégration, fait office d'« ambassadeur de la paix » et contribue à établir des relations amicales entre les différents pays et sociétés. Mais d’un autre côté, le sport est aussi fréquemment utilisé à des fins différentes, loin de l’instauration de la paix dans le monde. Dans le contexte de circonstances politiques particulières, de relations internationales et d’objectifs diplomatiques, la diplomatie sportive peut être utilisée à la fois pour résoudre des problèmes et servir de déclencheur de conflits ou d’instrument de pression politique. Cette dualité est la caractéristique déterminante du sport en tant qu’outil politique.
Par exemple, le match de football entre les équipes nationales d'Iran et des États-Unis lors de la Coupe du Monde de la FIFA 1998 était symbolique en termes de relations diplomatiques. Il y avait déjà beaucoup de troubles avant le match en raison de conflits politiques entre les deux États. Néanmoins, les athlètes des deux pays se sont offert des cadeaux et des fleurs et ont également été photographiés ensemble avant le match. Ce match était un symbole de l'échauffement des relations entre l'Iran et les États-Unis, qui a finalement conduit les deux pays à s'affronter lors d'un match amical aux États-Unis en 2000.
Cependant, les grandes compétitions internationales, en plus d’avoir pour effet positif d’unir les peuples du monde entier, peuvent aussi avoir un net trait de division. En outre, le mélange du sport et de la politique tend à être motivé par la poursuite d’intérêts égoïstes de pays qui ne sont pas du tout bénéfiques à la paix mondiale. Historiquement, cette dernière a été associée au fait d'utiliser le sport à des fins de manifestations politiques via le boycott, l'isolement des athlètes ou la propagande. Cela pourrait bien inclure les actions des nazis allemands et des fascistes italiens, qui ont utilisé les compétitions sportives internationales pour promouvoir la domination de leurs nouveaux systèmes politiques et idéologies.
Néanmoins, on constate un intérêt croissant pour la diplomatie sportive dans les relations internationales contemporaines. Ce n’est pas un hasard, à la frontière des XX-XXI siècles, un nouveau type de diplomatie publique, comme la diplomatie sportive, devient de plus en plus actif dans l’arsenal de nombreux États.
Aujourd’hui, la pratique consistant à utiliser le sport comme outil diplomatique se reflète non seulement dans l’organisation de compétitions, mais aussi dans la création de programmes, de documents et d’institutions qui, d’une manière ou d’une autre, coordonnent ces activités. Le Département d'État américain dispose notamment d'une division spéciale de diplomatie sportive, destinée à établir un dialogue par le biais du sport avec les jeunes du monde entier. Parallèlement, en 2019, le gouvernement australien a adopté une stratégie ambitieuse « Diplomatie sportive 2030 », qui vise à renforcer l'attractivité nationale.
Les gouvernements considèrent donc le sport comme un moyen efficace de promouvoir les intérêts nationaux et de projeter les valeurs et l’identité. Aujourd'hui, nous pouvons parler d'une direction absolument nouvelle de l'activité diplomatique, qui possède ses propres moyens, mécanismes d'activité et un potentiel particulier pour développer le dialogue entre les pays, tant au niveau multilatéral que bilatéral. Il a acquis une définition ces dernières années et est devenu un terme académique à part entière dans le cadre d'un vaste sujet de diplomatie publique.
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A propos de l'auteur
Nikita Bokserov est coordinateur des objectifs de développement durable de la jeunesse du SDSN et chercheur sur le sport pour la paix et le développement.
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